Histoire des départements

En regardant la liste des départements français, tu as bien sûr remarqué qu'ils sont classés par ordre alphabétique. Leur place dans ce classement leur attribue un numéro qui correspond au code postal. Jusque-là, rien à redire, cela suit une logique très claire. Mais as-tu observé que les départements 75, 78, 91, 92, 93 et 94 ne suivent pas cet ordre ?  T'es-tu déjà demandé qui avait instauré cette organisation territoriale?

Des thèses doctorales et des pavés de centaines de pages ont été consacrés à ces questions. Ici, tu trouveras un modeste résumé afin d'y répondre le plus succinctement possible.

À la veille de la Révolution française, nombre de cahiers de doléances faisaient mention du besoin d'une nouvelle division du royaume en départements, dans le sens de circonscription territoriale, avec un chef-lieu facilement accessible. En effet, à l'époque, la France était constituée de 39 provinces avec différentes subdivisions fiscales et administratives (seigneuries, comtés, duchés…).

C'est pourquoi un comité est chargé en 1789 de se pencher sur la question. Il en émerge plusieurs projets tels que : chaque département serait une circonscription commune à tous les services administratifs et dont la taille permettrait d'aller depuis n'importe quel point au chef-lieu et d'en revenir dans les 48 heures à cheval, soit un rayon de 30-40 km ; chaque division aurait un rayon de 15 km afin d'effectuer un aller-retour dans la journée ; un partage égalitaire selon la population ; un découpage géométrique du royaume en 9 grands carrés de 18 lieues de côté (soit 87 km), subdivisés en 9 parties. Les débats ont dû être animés…

En 1790, le nombre de 83 départements est fixé. La répartition respecte à peu près les données physiques et historiques des anciennes provinces. Après moult hésitations pour déterminer leurs noms, la plupart portent des noms de fleuves et de rivières, d'autres des noms de montagnes.

Au cours du XXème siècle, le nom de quelques-uns a changé, notamment ceux qui comportaient les adjectifs "inférieur" ou "bas", sûrement considérés péjoratifs : Charente-Inférieure devient Charente-Maritime (1941), Seine-Inférieure devient Seine-Maritime (1955), Loire-Inférieure devient Loire-Atlantique (1957), Basses-Pyrénées devient Pyrénées-Atlantiques (1969), Basses-Alpes devient Alpes-de-Haute-Provence (1970), et aussi Côtes-du-Nord devient Côtes-d'Armor (1990).

Le département 75 a une histoire à part. À sa création, il se nomme Seine, ce qui explique sa place dans le classement alphabétique. C'est presque deux siècles plus tard, avec une loi datant de 1964, qu'il est réorganisé. D'une manière simplifiée, disons que le centre s'appelle désormais Paris (75), puis s'entoure de 3 nouveaux départements : Hauts-de-Seine (92), Seine-Saint-Denis (93), Val de Marne (94). De plus, c'est l'ancien département 78, nommé Seine-et-Oise, qui est divisé : Yvelines pour la plus grande partie (78), Essonne (91), Val-d'Oise (95). Voilà, maintenant tu sais pourquoi les départements d'Île-de-France ne suivent pas le même ordre que les autres!

Carte de 1968

Carte parisienne actuelle

Soit dit en passant, l'histoire des départements d'Outre-mer fera sûrement l'objet d'un autre billet.

Maintenant, d'autres questions te taraudent l'esprit, n'est-ce pas? Comme celle-ci : d'où vient le nom d'Île-de-France puisque ce n'est pas vraiment une île? En fait, ce nom apparaît dès le XIVème siècle dans les chroniques de l'époque. Auparavant, on employait l'appellation de Pays de France pour désigner l'ensemble de 21 villages autour de Saint-Denis. Ce changement était dû au fait que le terme de pays avait pris le sens de nation. Il faut comprendre le mot "île" dans le sens de "presqu'île" car ce territoire comprenait la langue de terre délimitée par trois fleuves : l'Oise au nord, la Seine à l'ouest et la Marne au sud. Dans la pratique, la province d'Île-de-France était plus vaste qu'actuellement puisqu'elle englobait une partie de la Picardie.

Et le découpage régional actuel de l'Hexagone, de quand date-t-il? C'est à la moitié du XXème siècle que le processus de décentralisation s'est mis en marche, notamment avec la création de 21 régions qui ont un nouveau statut, celui de circonscription d'action régionale, ce qui implique une certaine autonomie par rapport au pouvoir central établi à Paris, mais sans autonomie budgétaire ni de légitimité démocratique. En effet, ce n'est qu'en 1982 que les conseillers régionaux sont élus au suffrage universel direct. Le statut des 22 régions a été modifié afin d'élargir leurs compétences. En 1970, on était passé au nombre de 22 avec la séparation de la Corse de la Provence-Alpes-Côte-d'Azur.

Mais c'est à la même époque, dans les années 80, que surgissent de vives critiques du millefeuille français, mais non, pas le gâteau, mais plutôt la superposition des trois niveaux d'administration locale : la région, le département, la commune. Il faut attendre 2010 pour la présentation d'un projet de loi qui vise à clarifier les compétences et alléger les coûts de ce système. Cela a abouti à un nouveau découpage du territoire, entré en vigueur en 2016, avec 13 "super régions" en métropole. Les mauvaises langues disent qu'il n'a rien allégé du tout…

Carte des régions avant 2015

Carte des régions depuis 2016

Pour en savoir plus sur le découpage régional de 2016 :

https://www.les-departements.fr/carte-des-regions.html

Pour plus de détails sur la chronologie du découpage territorial français depuis la Révolution :

http://regions-france.org/observatoire-politiques-regionales/region-longue-histoire/

Mais c'est à la même époque, dans les années 80, que surgissent de vives critiques du millefeuille français, mais non, pas le gâteau, mais plutôt la superposition des trois niveaux d'administration locale : la région (22 dans l'Hexagone, 17 en Espagne), le département (il y en a 96 en métropole, contre 50 provinces espagnoles), la commune (il y a presque 35 000 mairies françaises, contre 8 131 en Espagne!). Il faut attendre 2010 pour la présentation d'un projet de loi qui vise à clarifier les compétences et alléger les coûts de ce système. Cela a abouti à un nouveau découpage du territoire, entré en vigueur en 2016, avec 13 "super régions" en métropole. Les mauvaises langues disent qu'il n'a rien allégé du tout…